3 nov. 2010
Un blog trotter, dans l'air du temps... une semaine à l'aéroport
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Une semaine à l'aéroport - A. de Botton |
"Une semaine à l'aéroport"c'est un peu comme un "vie ma vie" au terminal 5 de Heathrow. Installé au milieu de la salle des départs, avec une table et un ordinateur, l'écrivain a tenté de décrire un bout du quotidien des personnes qui font la vie de cette fourmilière des temps modernes. D'habitude, le seul moment où l'on doit séjourner à l'aéroport c'est quand un vol est retardé. Alain de Botton se contente de suivre les voyageurs en partance, le personnel (RH, techniciens, managers... prêtres, etc.) qui part, lui aussi, chaque matin, mais pour "nulle part" (destination "sur place") et délivre un compte-rendu de ce qui ne mérite habituellement pas d'être relevé. Saisir la banalité, capter les choses à première vue sans importance de notre environnement. Ces choses que nous voyons, entendons, sentons et auxquelles nous ne prêtons aucune attention. Le livre se lit facilement. J'ai aimé le regard qu'il aide à porter. D'ordinaire, notre regard se porte sur ce qui nous intéresse. A l'aéroport nous poursuivons une fin : rejoindre l'avion qui va décoller ou récupérer ses bagages et sortir au plus vite du terminal. Nous ne voyons ni les personnes que nous croisons, ni les objets qui encombrent notre espace sauf à les voir comme des obstacles qu'il faut éviter afin de diriger nos pas dans la direction voulue. Ce livre se propose de mettre en valeur ce qui est habituellement zappé. Le livre s'attarde sur ces espaces que sont les zones de départs, de transit et d'arrivée. J'ai aimé l'idée de ces hôtels dont la vraie vocation n'est pas d'offrir une chambre pour la nuit mais de gérer des colloques et autres séminaires. J'ai suivi avec intérêt la réflexion autour du bien-être mental des voyageurs qui devient un enjeu commercial majeur de l'exploitant aéroportuaire et combien il est vain de tenter faire passer le personnel de la simple efficacité de l'accueil (compétence) et la vraie cordialité sensible (éducation parentale pour une grande partie). Je retiendrai, pour le fun, l’anecdote de l'aumônier qui constate, à son grand désespoir, que les gens qui viennent à lui ne sont plus en quête d'une quelconque aide spirituelle mais d'une assistance bien plus pragmatique parce qu'ils cherchent presque toujours les toilettes. Il y a aussi l'histoire de ce cireur de chaussures, qui, pareil à un dentiste, je cite, "n'oublie pas combien la vie peut devenir compliquée ni comme on peut renoncer facilement à se brosser les dents lorsque l'on tente de sauver son entreprise, où que l'on assiste un parent qui se meurt". Ce cireur fait de son mieux pour remédier à la dégradation de ses clients... "il comprenait que les gens font rarement cirer leurs chaussures par hasard : ils le font lorsqu'ils ont envie de tirer un trait sur le passé, lorsqu'ils espèrent qu'une transformation extérieure suscitera une transformation intérieure".
L'initiative de Alain de Botton n'est pas nouvelle mais elle apporte sa pierre à l'édifice, celle des autres écrivains et cinéastes qui se sont essayés, eux aussi, à la description de ce lieu symbolique de notre civilisation qu'est l'aéroport. Dans le même genre d'idée, je vous recommande de lire le blog de "Terminal Man", cet homme, muni d'un pass JetBlue illimité, et qui s'est promené d'aéroport en aéroport à travers les Etats-Unis, couchant chaque jour dans un terminal différent et livrant, durant un mois, ses impressions pour le magazine Wired ou encore le blog "Dans l'air du temps" d'Air Canada. Vous pourriez aussi revoir la scène de l'aéroport d'Orly dans "Playtime" de Jacques Tati et surtout les films "The Terminal" (réalisé par Steven Spielberg, avec Tom Hanks), "Tombés du ciel" (réalisé par Philippe Loiret, avec Jean Rochefort) ou encore "Here to Where" consacrés à l'histoire de ce voyageur apatride, Mehran Karimi Nasseri, qui avait élu involontairement domicile, pendant plusieurs années, dans l'aérogare de Roissy.
PS : "ce qu'il y a d'épatant avec le voyage, c'est qu'on en revient toujours".
PS2 : "on dit souvent que le monde est petit mais les brusques pannes de trafic aérien (volcans, grèves...) nous font réaliser à quel point notre pays et le reste du monde semblent gigantesques".
PS3 : Du même auteur : "Splendeurs et misères du travail"... je cite : "Ce qui est intéressant, c'est qu'on peut prendre sur soi d'aborder des tâches avec la plus grande détermination et gravité alors même que leur plus large absence de sens est manifeste..."
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